Si le barrage du Chatelot m’était conté (IX)
Comme le rappellera un texte aux ouvriers de ce chantier transfrontalier, « Les lois sur les douanes sont en vigueur pour le chantier ». Pas question de traverser la frontière ici : il faut se rendre aux Brenets ou à Biaufond. Et le message de préciser : « Les auteurs de délits de contrebande seront licenciés de suite » !
Des palplanches arrivent dès le 1er août 1950. Elles sont acheminées de France via le bureau de douane de Biaufond. Une pièce pèse 500 kg. Elles seront enfoncées de 2 mètres dans le sol et dressées dans le lit du Doubs (voir photo). Elles serviront à assécher le lit de la rivière et à diriger le Doubs vers les tunnels de dérivation.
A la mi-août un problème jugé coûteux occupe les ingénieurs. Il s’agit de l’eau potable. Elle arrive de La Chaux-de-Fonds dans des tonneaux à bière. La solution : pomper l’eau du Doubs dans un grand réservoir et la filtrer. Mais cela ne sera possible qu’ultérieurement lorsqu’il y aura de l’électricité…
Les cinq premières baraques sont posées et aménagées: 3 dortoirs, le magasin . La cantine sera tenue par la famille Hurlimann, qui logera sur place. Les prix : couche dans un dortoir 50 centimes, petit-déjeuner : 1,50 frs, dîner :
2,50 frs, souper : 2 frs. Un manœuvre est payé 2,17 frs à l’heure, un mineur 3,10 frs.
Nouveauté à compter du soir du 30 août de cette année 1950. Deux équipes se relaieront désormais pour travailler en non-stop. Celle du jour sera à l’oeuvre de 07 h à 18 h 00, celle de nuit de 19 h 00 à 06 h 00.
Début septembre, les 96 employés et ouvriers sont mis en garde : « Le passage de la frontière dans le rayon du chantier n’est permis que pour autant que le travail le demande (…). Les auteurs de délits de contrebande seront licenciés de suite ».
* Ancien journaliste au Matin, Jean-Pierre Molliet a vécu de 3 à 14 ans au Saut-du-Doubs. Il partage dans cette série l’album souvenir de son père, garde-frontière, à l’époque du chantier du barrage.