La météo, une aventure au coin de la rue

Bernadette Richard

Plus encore que la ville, entité vivante au sein de laquelle se mouvoir est un plaisir sans cesse renouvelé, la météo qui berce ou secoue les cités m’apparaît comme un bonheur quotidien.

Les feuillages vert tendresse et les éclats de couleurs aux arbres du printemps amènent des sourires sur les visages blanchis par l’hiver. Et tout d’un coup, hop, le soleil ronge le macadam, qui ondule et se craquelle en bulles de bitume surchauffé. Ne pas oublier son chapeau ni ses lunettes noires. Un mouchoir, peut-être, pour essuyer la sueur qui bientôt inondera le visage. Heureux temps des terrasses et des papotages de café du commerce sous les parasols. La ville exulte, les corps débraillés s’affichent sans pudeur – du moment que le ridicule ne tue pas.

L’automne n’en a plus que le nom et les teintes folles aux arbres, qui lentement se la jouent « demain j’enlève le bas ». Mais le bas est solide – tant qu’une scie ne vient pas l’assassiner – et les racines plongent profond dans la terre nourricière.

Et l’hiver arrive, frimas, crachin, déluge, peut-être la neige ? Une balade dans cette bruine glaciale qui transforme la ville en patinoire, se mue en défi au pays des Inuits. Plus besoin d’arpenter la Sibérie. La météo se charge de vous prendre par la main pour un tour de piste dans des ambiances ébouriffantes. Quelle ivresse de naviguer à vue dans les embruns qui s’effilochent sur les trottoirs renégats, guettant le faux pas pour vous expédier à l’hôpital… Et de regretter les talus de neige de mon enfance.

Aujourd’hui, quand s’éboule la reine blanche, on s’empresse de s’en débarrasser, privant les citoyens d’une atmosphère feutrée.

 

Derniers ouvrages, 2020: Dernier concert à Pripyat (L’Age d’Homme); L’Horizon et après (Torticolis Frères)

Bernadette Richard, dans son bureau, rue du Parc 65, un étage en-dessus... 
du Ô ! (photo gs)
Bernadette Richard, dans son bureau, rue du Parc 65, un étage en-dessus... du Ô ! (photo gs)

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