Comptes 2022 du Canton

Anthony Picard

Entre beau temps et coup de Joran

Alain Ribaux et Laurent Kurth affichaient un sourire prudent pour présenter un bénéfice de 6,4 millions alors que le budget prévoyait un excédent de produits de 10.3 millions. 

Sur la carte de la Suisse, les 26 cantons ont bouclé leurs comptes sur un bénéfice, souvent grâce à la répartition de 4 milliards provenant du bénéfice réalisé en 2021 par la BNS. A y regarder de plus près, les finances cantonales se lisent sous un œil différent que l’on soit à la tête de l’Etat, influenceur politique ou simple citoyen. On retiendra du rapport que le versement de 81,6 millions de la BNS ainsi que des recettes fiscales sous-estimées ont permis de faire mieux que d’équilibrer les comptes. Sans ces importants revenus, la crise Covid, la guerre en Ukraine et la hausse de l’énergie auraient provoqué la dissolution de réserves. Dans le suivi des 3 critères du frein à l’endettement, le gouvernement constate que seul le montant des investissements est inférieur (2,7%) en raison du report de certaines réalisations. Mentionnée aussi, la maîtrise des charges salariales des 2’453 collaborateurs qui laisse apparaître une économie de 4,4 millions sur les 460 millions versés.

Pour les mauvais jours, l’Etat a mis de côté en 2022 un montant de 61,6 millions de francs portant à plus de 121 millions le fonds de réserve conjoncturelle. Celui-ci permettra de faire face à certains risques inventoriés comme ceux qui touchent le secteur de la santé pour lequel une réserve de 46,8 millions est inscrite. Toujours en matière de santé publique, les comptes montrent que ce poste reste le plus gourmand en termes de ressources avec 425 millions devant l’éducation (409 millions) et la prévoyance sociale (348 millions).

 

Fin du joli conte susurrée

En raison des mauvais indicatifs, le gouvernement prévoit pour 2023 un important déficit qui devrait faire plonger les comptes dans le rouge vif, bien au-delà du déficit de 13,6 millions voté par le Grand Conseil. Absence de dividende de la BNS, refinancement d’un système de santé aux prises à des charges supplémentaires, inflation galopante, loyer de l’argent reparti à la hausse, autant de préoccupations pour l’économie et les finances 2023. Le gouvernement, qui parle de rigueur, va devoir travailler ferme d’autant plus que des initiatives autour de la péréquation cantonale (Le Ô du 28 avril 23) et du pourcentage alloué au sport et à la culture devront, si elles sont acceptées, être financées. 

A la fin de son communiqué, le Conseil d’Etat regrette que « la croissance de la population neuchâteloise reste inférieure aux attentes et que l’économie cantonale demeure fortement exposée aux aléas conjoncturels ». Sur cette réalité, ni les habitants ni le gouvernement n’exercent une quelconque influence ; pas plus sur les dividendes reversés par la BNS. Cela dit, pour que nos budgets ne dépendent pas de revenus et charges extraordinaires – qui sont par nature imprévisibles – il est temps de construire un budget cantonal qui fasse abstraction de l’extraordinaire.

Question à 5 francs, compte tenu de la réalité du plein emploi – du jamais vu depuis des décennies – d’une augmentation moyenne des salaires et de l’augmentation du bénéfice des sociétés, les recettes fiscales permettront-elles de limiter le déficit majeur attendu pour 2023 ? 

L’évolution du compte de résultats de 2015 à 2022. (Sources : Canton NE)
L’évolution du compte de résultats de 2015 à 2022. (Sources : Canton NE)

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