Les gabarits posés dans le champ de Bellevue, ceinturant l’usine Sored choquent le voisinage. Ce vaste espace vert, propice chaque hiver aux bobs et autres « glissepettes », risque d’être dénaturé par le projet qu’esquissent les piquets de 20 m ? Agrandissement de l’usine? Logements? Réponse sur le site des mises à l’enquête publique: ce seront quatre immeubles d’habitation avec parking souterrain et surfaces commerciales. Ce point aiguise encore les protestations. La Tchaux verte, association qui avait fait capoter le parking du Bois du petit Château pour le Muzoo, va-t-elle ressortir du bois ? Lire aussi dans Le Ô de ce vendredi.
Les protestations fusent. « Dans une ville dont les commerces du centre sont sinistrés, et ou les centres commerciaux pullulent déjà en périphérie, c’est n’importe quoi de rajouter des surfaces commerciales là », estime une habitante. La Ville pleure ses grands arbres fauchés par la tempête, et on va encore en couper une dizaine, déplore un autre. « C’est estomaquant qu’on ait pas prévu de zone tampon autour de cette parcelle classée en haute densité pour préserver la zone contigüe d’utilité publique. Elle est un lieu de jeu et de rencontres qui fait le bon vivre à La Tchaux ! ».
Dangereux pour le Collège
« Cela va arracher le cœur à des centaines, voire des milliers de Chaux-de-Fonniers : c’est si génial de pouvoir faire du bob en pleine ville ». Une riveraine souligne que « cela va encore rajouter beaucoup de trafic autour du Collège, zone déjà critique. Et ces espaces verts, comme la Sorcière ou les Cibles derrière le Bois du Petit font la nature de notre Chaux-de-Fonds… ».
Pas de dérogations !
Au service de l’urbanisme, dites « Etoile 21 ». L’interlocuteur répond, « Ah, Sored », preuve que le projet ne vient pas de surgir.
Patrick Jobin, chef du service, note que le projet initial, qui comportait « plus d’étages », a « déjà été redimensionné ». Et qu’il ne bénéficie d’aucune dérogation en matière de largeurs et hauteurs des quatre immeubles projetés.
Sur cette zone, la hauteur maximale est de 18 mètres. Mais les gabarits posés atteignent 20 mètres ! « Oui, car la hauteur maximale à la corniche autorise qu’on y ajoute celle des attiques, dont le toit sera lui à 20 ou 21 mètres », explique Patrick Jobin. Quant la largeur du complexe, avec 45 mètres sur 14 m, il est présenté dans les normes.
Les surfaces commerciales ? Trois sont prévues, pour un total de 1000 m2, ce qui est la limite supérieure possible. « Nous ne pouvons pas empêcher un promoteur de créer des surfaces commerciales », précise le chef de l’urbanisme. En revanche, en tant que voisine de la parcelle avec son Collège de Bellevue, la Ville pourrait faire opposition au projet si celui-ci représente un trop gros impact à ses yeux pour son propre bâtiment. C’est vrai que la salle de gym va perdre la vue actuelle sur les arbres…
Et sur l’aspect piste de bob ? « On est bien conscient que le bas de la piste, qui finissait sur la parcelle de Sored, sera sérieusement amputé », note Patrick Jobin. « Mais si des barrières ou obstacles ne sont pas posés pour délimiter le haut de la parcelle, les enfants devraient pouvoir en profiter encore un peu en manoeuvrant… ». reste que la pose ou non d’une cloture ou d’une haie dépend du libre choix du propriétaire.
Au bas de la parcelle, à la rue du Docteur Kern, les commerces dépasseront du sol et formeront un front.
Au sein de l’Administration communale, un autre responsable note que le dossier s’annonce « Chaud-bouillant »… Une pluie d’oppositions est en effet à attendre. Voire plus : « Même si au niveau administratif il ne devait pas y avoir de possibilité de modifier le projet, une pétition populaire doit arriver à émouvoir les promoteurs et les convaincre de sauver au moins un bout du champ pour que la piste de bob reste utilisable », note notre riverain.
Chez Sored SA, l’entreprise concernée et porteuse du projet, nous n’avons pas pu joindre de responsable avant le départ à l’impression de cette édition. A suivre donc.
« Comme l’histoire de mon roman au Brésil ! »
Le sociologue François Hainard vient de sortir un éco-roman narrant le combat d’un jeune Brésilien pour sauver d’une méga-projet immobilier une forêt naturelle dans la banlieue de Sao Paolo. Parallèle saisissant… « Toute proportion gardée, on est dans la même problématique ici : le diable passe par les poches… Ca m’attriste. D’autant que je sais qu’il y a des espaces plus propices ailleurs en ville, du côté de la scierie des Eplatures par exemple ».
Et le sociologue de noter, « dans une autre intensité », que Carrefour et Casino viennent de faire défricher 6500 hectares de forêt au Brésil par l’entreprise qui les fournit en soja… » Une pétition pour sauver le champ de Bellevue ? Bien sûr que je la signerais. Je pourrais même m’engager dans un comité de sauvetage, lance le Chaux-de-Fonnier d’adoption. Interview à suivre dans Le Ô ces prochaines semaines ! G.S.
