« La Chambre Noire » : récit sur une mère maltraitante

Dunia Miralles

Enfant martyre, l’écrivaine Bernadette Richard a confié un jour : « On m’aime, on me tue ! »

Malgré les sept décennies qui la séparent des brutalités imposées par sa mère, Bernadette Richard ne s’est pas encore remise de son enfance. Un poids dont elle se soulage dans son dernier livre : « La Chambre Noire ». Une fiction, certes. Toutefois, les sévices infligés par une mère à sa fille, l’attitude des proches et le mode de vie, sont ancrés dans un espace-temps dont les « boomers » se souviennent encore !

Le récit se situe dans le milieu ouvrier chaux-de-fonnier où la pauvreté, le froid et le silence complice de l’entourage, face à des maltraitances qui n’étaient pas reconnues par la loi, étaient bien réelles. La majeure partie de l’histoire se déroule dans les années 1950-1960, mais le livre couvre trois générations rongées par une pathologie non diagnostiquée. Pour le prolétariat, c’était très stigmatisant de consulter un psychiatre. Être « fou-folle » était la pire des tares. Mais un mot se chuchotait parfois : « neurasthénie ». Un mal que Bernadette Richard connaît bien puisque son grand-père, sa mère et d’autres membres de sa famille ont volontairement mis un terme à leur vie.

C’est en puisant dans des souvenirs marqués à même la chair, que l’écrivaine a imaginé cette histoire qui témoigne de ces trente glorieuses, qui ne furent ni glorieuses, ni festives, pour tout le monde. L’écrivaine avait déjà écrit un livre sur sa mère, l’un des best-sellers romands de 1985.

« Après la publication de « La femme déserte », j’ai senti que ma narration n’était que la pointe de l’iceberg. Je condamnais les mœurs de l’après-guerre qui soumettaient l’épouse au mari – et aux hommes en général –, mais je sentais qu’il manquait quelque chose. Peu à peu, des souvenirs sont revenus. J’ai effectué des recherches et ils se sont confirmés. C’est ainsi que j’ai appris que ma mère avait été violée. Elle souffrait probablement déjà auparavant d’un problème de santé mentale, mais cette agression a dû le renforcer. Par ailleurs, dans mon quartier, plusieurs familles étaient violentes. Notamment les femmes envers leurs enfants. D’autant que, dans ces années-là, on n’éduquait pas, on dressait. Ainsi, pour écrire « La Chambre Noire », j’ai fondu trois familles en une seule ».

De sa traumatisante enfance, il reste à B. Richard une douloureuse cicatrice qui l’empêche, depuis toujours, d’être pleinement heureuse. Comme sa protagoniste, elle confiera un jour à un psychologue que dans son inconscient amour rime avec destruction : « On m’aime, on me tue ».

« La Chambre Noire », Bernadette Richard, éd. Favre.
Dédicaces : samedi 11 novembre à la librairie Payot. Horaire : 11h-13h.

Le supplice de La Chambre Noire

Bernadette Richard raconte, sans voyeurisme, les différents supplices, plus barbares les uns que les autres, qu’une mère inflige à sa fille depuis sa naissance. Notamment, le cagibi sans lumière où elle l’enferme. L’enfant, qui ne demande que de l’amour, se résigne finalement, en attendant d’être adulte, à vivre dans la violence. Heureusement sa tante et son oncle, avec leurs maigres moyens, tentent de l’aider. Un drame familial où le père, soucieux de ne pas perdre la face, ne désavoue jamais publiquement son épouse. Il n’en demeure pas moins une figure aimante. Par ailleurs, l’écrivaine a aussi tenu à rendre compte d’une époque où les ouvrières qui posaient du radium sur les cadrans mouraient prématurément à l’instar des femmes qui se faisaient avorter clandestinement.

« La Chambre Noire » : récit sur une mère maltraitante

Le supplice de La Chambre Noire

Bernadette Richard raconte, sans voyeurisme, les différents supplices, plus barbares les uns que les autres, qu’une mère inflige à sa fille depuis sa naissance. Notamment, le cagibi sans lumière où elle l’enferme. L’enfant, qui ne demande que de l’amour, se résigne finalement, en attendant d’être adulte, à vivre dans la violence. Heureusement sa tante et son oncle, avec leurs maigres moyens, tentent de l’aider. Un drame familial où le père, soucieux de ne pas perdre la face, ne désavoue jamais publiquement son épouse. Il n’en demeure pas moins une figure aimante. Par ailleurs, l’écrivaine a aussi tenu à rendre compte d’une époque où les ouvrières qui posaient du radium sur les cadrans mouraient prématurément à l’instar des femmes qui se faisaient avorter clandestinement.

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