Prophète de la chute DE l’URSS, Emmanuel Todd prédit la victoire du Kremlin
Il avait prédit l’effondrement de l’Union soviétique et le déclin de l’empire américain, Emmanuel Todd brise les certitudes occidentales sur l’évolution du conflit ukrainien et le risque de voir éclater une Troisième guerre mondiale. « La guerre n’est pas terminée mais après l’échec de la contre-offensive ukrainienne et l’incapacité manifeste des pays de l’OTAN à fournir à l’Ukraine des armes, l’Occident est sorti de l’illusion d’une possible victoire ukrainienne. » C’est le postulat de l’historien et anthropologue français dont la démonstration s’appuie sur trois éléments. La déficience de l’industrie militaire américaine et l’incapacité de la super puissance mondiale à livrer en suffisance des armes à son protégé ukrainien. La solitude idéologique de l’Occident qui s’autodétruit, bien inconscient de son isolement international. La résistance inouïe de l’Ukraine – un failed state corrompu devenu la terre promise de la gestation pour autrui (GPA) – et celle tout autant surprenante de la Russie, en dépit des sanctions internationales, inédite, auxquelles elle est confrontée. L’auteur s’interroge aussi sur les acteurs de cette tragédie. « Depuis plus d’une décennie, la Chine était désignée par l’Amérique comme son ennemi principal. Or, par Ukrainiens interposés, c’est à un affrontement entre les Etats-Unis et la Russie auquel nous assistons. »
Dans une relecture de l’histoire contemporaine récente, au-delà des apparences d’unité et de front occidental commun, Emmanuel Todd met aussi en exergue les divisions et les transformations géopolitique de l’Union européenne. « L’Allemagne a accepté sans broncher le sabotage des gazoducs Nord Stream qui assuraient son approvisionnement en énergie. La France d’Emmanuel Macron s’est vaporisée sur la scène internationale, tandis que la Pologne est devenue l’agent principal de Washington dans l’Union européenne. A l’axe Paris-Berlin, s’est substitué un axe Londres-Varsovie-Kiev, piloté par les Etats-Unis. Cette évanescence de l’Europe en tant qu’acteur géopolitique a de quoi laisser perplexe si l’on se souvient qu’il y a à peine vingt ans l’opposition conjointe de l’Allemagne et de la France à la guerre en Irak. » Comme la plupart des guerres, surtout mondiales, rien ne se déroule comme prévu. L’auteur dépeint en filigrane la chute de l’Occident qu’il renvoie à l’affaiblissement du protestantisme américain. Revendiquant l’héritage de Max Weber et son célèbre essai L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme,
Emmanuel Todd dénonce « le nihilisme occidental a fusionné avec celui de l’Ukraine, né, lui, de la décomposition de la sphère soviétique. Ensemble, OTAN et Ukraine sont venus buter sur une Russie stabilisée, redevenue une grande puissance, désormais conservatrice, rassurante pour ce reste du monde qui ne veut pas suivre l’Occident dans son aventure ».
La Défaite de l’Occident, Emmanuel Todd, Ed. Gallimard.