Que du bonheur, j’ai rencontré, il y a un mois, un type formidable. Les copines me mettent en garde : « Soit il est trop vieux et il cherche une infirmière, soit il est divorcé et il a besoin d’une mamie au foyer, ou alors il est homo. »
Je sais tout ça, les filles. Je sais. Mais lui c’est particulier, toujours d’humeur égale, serviable, peu communicatif – je suis certaine de ne pas perdre mon temps avec ses états d’âme ou ses hauts faits d’armes –, et bouillonnant de bons sentiments à mon égard.
Elles font la moue, elles n’y croient pas. Que faire pour les convaincre ? Les inviter chez moi, afin qu’elles jugent par elles-mêmes ? Je suis généreuse, mais de là à partager mon plus précieux acquis, c’est un pas que j’hésite à franchir…
Elles me pressent de questions, nom, âge, situation financière, look.
Je réponds :
– Gustave, il s’appelle Gustave, peu importe son âge, et vous me connaissez, je me fous bien de sa situation financière, quant à son look… d’une élégance à couper le souffle. Et je l’avoue, son petit ventre rond est tellement rassurant.
– Euh, il est Suisse ton Gustave au p’tit ventre rond ?
Je vois presque de la pitié dans leur regard.
– Non, il est Russe, je l’ai rencontré dans une boutique à Utrecht.
– Manquait plus que ça, un Russkoff. Mais bon il est loin d’ici, tu vas pas le ramener ?
– En fait, il est déjà installé à la maison !
Ça leur coupe le kiki, les yeux au ciel, les mains sur la bouche, elles ne savent plus quoi dire.
– Faut quand même que je vous avoue quelque chose. C’est grâce lui que je me suis réconciliée avec le thé.
– La belle affaire !
Peut-être que finalement je leur présenterai Gustave, mon cher samovar.
Dernières parutions : La Chambre noire, récit, Favre éd., 2023. Hibakusha – Oppenheimer, le défi des parias, Pièce de théâtre, Le Grand Cargo éd., La CdF, 2024.