Univers 25 : des rats du paradis à l’enfer

Dunia Miralles

L’être humain a toujours méprisé les animaux qui lui ressemblent. Exemples : le porc avec lequel on partage 95 à 98 % de notre patrimoine génétique, l’âne qui est têtu et indépendant, ou le rat dont la vie sociale et l’opportunisme sont proches des nôtres.

En 1958, l’éthologue américain John B. Calhoun mena des expériences de surpopulation chez les rats. Il plaça quelques couples dans une ville créée spécialement pour eux, avec tout ce dont ils avaient besoin. Il estima que ce lieu permettrait à cinquante rats de bien vivre. Les animaux commencèrent rapidement à se reproduire. Au bout d’un an, il y avait six cent vingt rats. Ils se mirent à se mordre les uns les autres. À créer des hiérarchies. Ceux qui commandaient étaient très agressifs. L’ensemble de la population commença à souffrir de dépression et de problèmes de comportement. Les plus âgés étaient expulsés de plus en plus tôt. Les rates ne menaient plus leurs grossesses à terme. Les bébés commencèrent à mourir. Les femelles pratiquaient l’infanticide et les mâles le cannibalisme. Les plus jeunes ne se consacrèrent plus qu’à leur toilette, à manger et à dormir, sans se reproduire. Deux ans après le début de l’expérience, naissait le dernier rongeur. La population, qui avait culminé à deux mille deux cents rats, s’effondra. Certaines femelles furent sorties de cet enfer. On les plaça dans un environnement adéquat pour vivre, mais les traumatismes les empêchèrent de se reproduire.

L’être humain méprise les animaux qui lui ressemblent. Probablement parce qu’ils ne le reflètent pas forcément sous son meilleur jour. Peut-être parce que se reconnaître inconsciemment en eux le dégoûte.

Verni ce mercredi à Neuchâtel : Caravelles du Seyon, éd. Alphil.
Parutions 2023 : Le Gouffre du Cafard, éd. BSN Press, Le baiser d’Anubia, éd. Torticolis et Frères.

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