Bientôt Noël et une question source de nuits sans sommeil « quel cadeau offrir ? » Avec Le Miroir des âmes, le thriller de Feuz adapté en BD par Sjöstedt, l’affaire peut être vite pliée. A l’instar du saucisson et des tripes à la neuchâteloise, ce premier tome fleure bon le terroir. Le livre vient de sortir de presse.
Ça devait arriver !
À force de circuler dans les salons du livre, les deux Nicolas ont fini par se rencontrer. Exerçant chacun un métier, procureur pour l’un, éditeur pour l’autre, les compères ont en commun de s’être fait connaître via leurs hobbies. Respectivement écriture de polar et dessins de presse.
Nicolas Feuz
Le procureur de 53 ans signe depuis 2010 des thrillers se déroulant dans des lieux connus de son lectorat romand. Des polars à succès : ventes supérieures à 20 000 exemplaires. Parce qu’il aime ça, le procureur rêve de raccrocher sa robe à l’été 2026 pour se livrer totalement à sa passion. Auteur d’une vingtaine de polars depuis 2010, le Neuchâtelois est devenu iconique dans sa spécialité comme Joël Dicker ou son ami Marc Voltenauer.
– Votre rencontre avec Nicolas Sjöstedt ?
– En 2018, au Salon du livre, mais je crois que c’est à la foire du livre du Locle que nous décidé d’adapter mes livres en BD.
– Pourquoi Le Miroir des âmes ?
– De 2010 à 2017, j’ai édité 8 livres à compte d’auteur. Le Miroir des âmes a été le premier titre édité par Slatkine & Cie à Paris. C’est aussi le premier qui met en scène le procureur Jemsen. Logiquement, après la parution du second album du Miroir, la suite des enquêtes s’enchaînera.
– Avez-vous eu un droit de regard ?
– J’ai pu donner mon avis sur le travail de Pascal Piatti, un scénariste qui a su adapter l’intrigue au format BD. De son côté, l’illustrateur a bénéficié d’une carte blanche ce qui ne m’empêche pas d’ajouter que le style à la Blake et Mortimer est très réussi.
– Est-ce que vous avez financé cette BD ?
– Absolument pas. En revanche, j’ai agi auprès de mon éditeur pour que l’avance de trésorerie, les fameux « à-valoir » ne soit pas exigée avant publication. Un coup de pouce apprécié de la jeune maison d’édition Chez Yvette.
– Des séances de dédicaces communes sont-elles prévues ?
– Oui, la première aujourd’hui chez Payot à Yverdon, puis celles du 21 décembre chez Payot La Chaux-de-Fonds et Neuchâtel. Avis aux lecteurs, nous serons trois avec Marc Voltenauer et son nouveau titre Fatal Abîme.
– Un produit dérivé qui va booster votre carrière ?
– Tout ce qui peut promouvoir mon œuvre est bénéfique. J’espère que la BD attirera un nouveau public et qui sait, un jour, il commencera par la version BD et suivra avec le livre.
– Un mot sur votre dernier roman Les Extradées ?
– Les deux tiers de l’histoire se passent dans le milieu oppressant de la prison pour femmes de Lonay. Ambiance lourde autour de cinq détenues qui vivent en circuit fermé avant de prendre l’air du Val-de-Ruz et de la Broye vaudoise pour accompagner le procureur dans la recherche d’une jeune adolescente disparue. Confiée au procureur Jemsen, l’enquête mêle harcèlement et pression scolaire sur fond de réseaux sociaux.
– Les prochains ?
– Avec Marc Voltenauer nous sommes associés pour écrire Ultimatum à quatre mains. Notre roman qui sortira le 25 février 2025 paraîtra simultanément en français et en allemand. L’histoire tourne autour des instances fédérales et de l’armée suisse. Le suivant est une suite des enquêtes de Norbert Jemsen avec une trame se déroulant à huis clos dans un chalet des Montagnes avec en toile de fond l’OTS.
– À quand une vie d’écrivain à 100 % ?
– Depuis 2021, j’occupe la fonction de procureur à 70 % et si cela avait été possible, j’aurais diminué mon pourcentage à 50 %. Quelle que soit ma décision qui n’interviendra au plus tôt qu’au printemps 2026, elle sera difficile à prendre.
– Voltenauer, Feuz et Dicker, un point commun ?
– Celui d’être édités chez Rosie & Wolfe, la maison d’édition fondée par Joël qui nous ouvre de super perspectives pour être diffusés dans la francophonie et partout dans le monde.
Nicolas Sjöstedt
– Vous avez tenu le pari. L’élément clef de ce marathon ?
– La pression du temps a été le principal facteur de réussite du projet. Huit mois pour faire 54 planches. Il a fallu cravacher pour tenir les délais et faire des choix stratégiques comme celui de confier la mise en couleur à Florent Daniel.
– Facile d’adapter un roman en BD en conservant la trame originelle ?
– L’exercice est périlleux et il a fallu toute l’expérience du scénariste Pascal Piatti pour respecter le récit initial. Ce qui est encourageant avant le retour des lecteurs, c’est la satisfaction de Nicolas Feuz (ndlr : de bon augure puisque le scénariste travaille sur l’adaptation du polar Le Dragon du Muveran de Marc Voltenauer)
– Pourquoi commencer par Le Miroir des âmes ?
– Dans une collection, il faut toujours un premier livre. Chez Yvette, nous travaillons sur la nouvelle collection Pistes noires qui veut adapter des polars en BD. Si le second tome du Miroir des âmes est à l’agenda, des auteurs de la trempe de Voltenauer et Dicker pourraient enrichir notre collection.
– Comment avez-vous réuni le budget ?
– En recherchant des donateurs avant le premier coup de crayon. Grâce à la ville de Neuchâtel et la Loterie romande, nous avons pu payer le coloriste et le scénariste et en négociant les droits d’adaptation à Paris sans devoir acquitter les « à-valoir ». Puis grâce au privé qui a avancé les coûts d’impression. Avec une pointe d’autodérision : aussi parce que le dessinateur a été d’accord de différer son cachet !
– 5000 exemplaires : quid des ventes en souscription ?
– Nous n’avons pas fait de souscription. Mais notre diffuseur Dargaud suisse est confiant sur le potentiel des ventes puisque 3000 livres ont déjà trouvé place dans les librairies de Suisse romande.
– Un mot sur vos autres projets ?
– Pour la Croix-Rouge, je travaille sur un livre à paraître en 2026 qui relate la retraite des Bourbaki qui coïncide avec la première action humanitaire de l’institution. En parallèle, je dessine pour le tome 2 du Miroir des âmes. Chez Yvette, ce ne sont pas les projets qui manquent mais le temps pour les réaliser.
- Éditeur, un métier en péril ?
– Tant qu’il y aura des femmes et des hommes, il y aura des histoires à diffuser et des éditeurs pour le faire. Même si le métier présente le risque d’éditer des livres qui ne se vendront pas, le métier a un bel avenir.