La danseuse chaux-de-fonnière partage dans Le Ô sa montée en puissance à Paris. Avec ses joies et… une catastrophe.
Voilà qu’enfin je touche du doigts mon rêve (lire Le Ô du 22 novembre). Les répétitions commencent. Je découvre les backstages de Disneyland ainsi que mes collègues, les capitaines, les chorégraphes, les régisseurs et la magie dans laquelle je vais travailler pendant six mois. Je suis sur un petit nuage et plus les jours avancent, plus je réalise que c’est réel. Je retrouve des amis que je connaissais grâce à ma formation, des personnes que j’ai connues en audition et je découvre de nouveaux artistes. Nous sommes une belle équipe et l’ambiance est plutôt sympathique.
L’apprentissage des chorégraphies est plutôt rapide, nous apprenons un tableau par jour et en plus, nous avons trois places différentes à mémoriser par tableau. Mon cerveau était en ébullition. J’ai dû me concentrer pour suivre : je ne me laissais pas le droit à l’erreur. Encore plus quand il s’agit de contrat professionnel.
Mes notes étaient remplies d’explication que je n’arrivais même plus à décrypter le jour d’après. Je me suis forcée à me détendre et à me faire confiance. J’ai tout autant ma place que les autres sur ce contrat et les capitaines me l’ont bien fait comprendre. Les répétitions s’enchaînent et après deux semaines, nous avons appris l’entier du show. Nous attaquons alors les filages.
Vendredi 15 novembre en fin de journée, après une bonne semaine de répétition et avant un week-end bien mérité, nous faisons un dernier filage. Lors de ce dernier, à une chorégraphie de la fin du spectacle, je m’élance sur un saut ou je devais atterrir uniquement sur ma jambe gauche et là, le drame survient…
Je sens mon genou sortir de son axe. Je tombe au sol. Incapable de me relever. Je suis sonnée. Je n’arrive plus à donner mon prénom, ni savoir ou je me trouve. C’est là que l’équipe entière se mobilise, la salle est évacuée et les pompiers arrivent. Ils m’emmènent à l’infirmerie de Disneyland, puis à l’hôpital pour une radio. Je reprends mes esprits, j’ai très mal mais je reste confiante en me disant que c’est simplement une luxation de la rotule et que dans deux semaines on n’en parle plus. Malheureusement cela ne se passe pas exactement comme je le souhaitais.
Après une IRM, le verdict tombe : rupture complète du ligament croisé. Mon monde s’effondre. On me parle d’opération et de minimum sept mois d’arrêt. Je perds mon contrat et ma raison de vivre. J’avais l’impression que malgré tout mon travail et ma détermination, la vie ne voulait pas que je réussisse. J’avais pourtant une hygiène de vie irréprochable, je dormais assez, je mangeais bien… C’était trop injuste. Je me suis dit que parfois l’univers veut te tester encore plus. Et c’est à cet instant que le mental rentre en jeu.
Il m’a fallu un certain temps pour surmonter le coup, pour réussir à en parler sans que je m’effondre et surtout pour retrouver espoir. Il y a un sens à tout ce qui nous arrive. Je vais rebondir. Je ne me laisse pas le choix : j’aime trop mon métier pour que ça s’arrête. Je ne vibrerais plus ! Je suis quelqu’un qui vit à travers ses émotions, et à cent pour cent. Seule la danse me le permet.
Je veux revenir encore plus forte et surtout ne plus jamais douter de moi, je n’ai plus le temps. Je suis une battante, une guerrière qui accuse les coups mais qui arrive toujours à se relever grâce à ma passion. Pour rien au monde je ferais un autre métier. Il va me falloir du courage et de la patience. Mais je vais revenir. Plus déterminée que jamais avec un bagage qui m’a appris énormément. Se blesser est la pire chose qui peut arriver à un sportif d’élite, mais tout ce qui ne tue pas nous rend plus fort.