Immersion avec de jeunes enfants en charge de rédiger un roman collectif ! Lorsque j’arrive dans la classe de l’école alternative privée Scola Bumbaïa, la petite vingtaine d’élèves de 8 à 12 ans baigne dans une énergie folle. La prof Julie Guinand lance alors la lecture d’une partie de leur roman fantaisie. Chacun prend la parole à tour de rôle pour lire un bout de leur création. Je vous la fais courte : c’est un apprenti forgeron dont le maître est tué par un affreux méchant et il part en croisade avec ses compagnons en quête de vengeance. Ouvrons les chapitres…
❶ Chapitre 1 : « Vous voulez qu’on vous présente les personnages ? »
Au fur et à mesure du récit, l’implication et le cœur mis à l’ouvrage par ces jeunes pousses sautent aux yeux. Elles ont poussé l’exercice jusqu’à dessiner une carte pour donner du corps à leur histoire. « Il y a 4 royaumes, la montagne de l’Ouest, le village des nains et la villa de Ffrodhmôrrh, le méchant. Elle trône en pleine forêt et il y a 1800 chiottes rien qu’au rez-de-chaussée… », font fuser les jeunes de tous côtés. Je rigole devant tant de créativité débordante. « Vous voulez qu’on vous présente les personnages ? » Bien volontiers, allons-y !
❷ Chapitre 2 : L’histoire prend forme depuis 3 mois dans une douce folie
« En plus de Chanelle Coco qui a le pouvoir de se détacher de ses membres (ouchh !) et de la poule Georginette, capable de lire l’avenir, il y a bien sûr le héros de l’histoire : Quiros ! » Depuis
3 mois, l’histoire prend ainsi forme dans cette douce folie que j’ai la chance de partager. Différents groupes ont été créés pour faire émerger des idées de rebondissements. Les éléments clés ont souvent donné lieu à d’intenses négociations. « Pour les départager, on les notait sur le tableau et on votait pour le meilleur. » Mais devant tant d’imagination, pas facile de se tenir aux 10 pages prévues par Julie Guinand.
❸ Chapitre 3 : L’histoire devait faire 10 pages, elle en fait 80… au format A4 !
« Aujourd’hui, le roman est presque terminé et il compte… 80 pages au format A4 ! J’ai proposé l’écriture de ce roman collectif pour l’avoir déjà fait dans mes expériences précédentes. C’est la première fois que cela prend une telle ampleur. Si cela s’est fait dans la bonne humeur, je souligne le sérieux et la qualité de leur travail. J’en ai été surprise », avoue-t-elle. « Tu nous faisais pas confiance, c’est pas très cool », lui réplique un jeune garçon au milieu des rires. Un autre jeune homme en profite pour me glisser à l’oreille qu’il aimerait bien qu’un personnage tue sa femme parce qu’elle n’a pas fait le ménage. à côté de moi, une jeune fille entend la confidence et une opposition générale féminine se met en place.
❹ Chapitre 4 : le plus difficile, « se mettre d’accord ! »
Toutes les voix finissent par s’accorder quand je leur demande qu’est-ce qui a été le plus difficile dans cette aventure : « Se mettre d’accord ! C’est vraiment très animé parfois. » Et je ne vais pas tarder à en avoir une nouvelle preuve avec le choix du titre du roman qui va se faire en ma présence. Sur la douzaine de propositions, il en reste deux à départager : La légende des quatre royaumes d’un côté et Le mystère du fruit du dragon. Résultat : 9 voix pour le second et
8 voix pour le premier. Je décide alors de lever la main à mon tour en faveur de La légende des quatre royaumes. Égalité !
❺ Chapitre 5 : quand le journaliste fait trembler les 4 royaumes
… Et bronca dans la salle de classe ! « Le journaliste n’a pas le droit de voter », dit une « canaille ». « Si, il a le droit et sa voix compte triple », rebondit un sage petit ange. Qui aura eu le dernier mot ? Suspense ! Vous le saurez bientôt. Le roman va bientôt être mis en page et imprimé à une centaine d’exemplaires. Il sera vendu à la fête de printemps de l’association La Coquille, le 17 mai. Il sera aussi disponible à la bibliothèque des jeunes ainsi que sur le site de l’école : scola-cdf.ch. De quoi ravir la maîtresse Julie Guinand qui est également écrivaine.