Les Verts-libéraux seuls au centre, opposition de plus en plus marquée entre les blocs gauche/droite et déprolétarisation du parti socialiste, décryptage des prochaines élections avec la politologue Line Rennwald.
Notre experte : Line Rennwald est la fille du politologue, journaliste jurassien et figure du parti socialiste Jean-Claude Rennwald. Elle réalise en 2016 une étude intitulée Le vote ouvrier en Suisse, 1971-2011. Elle revient sur l’histoire des différentes élections pendant quarante ans et essaie de comprendre pourquoi les ouvriers se détournent petit à petit des partis de gauche comme le PS. En 2015, elle sort son deuxième livre Partis socialistes et classe ouvrière sur le même sujet. La Jurassienne travaille actuellement au centre de compétences suisse en sciences sociales à Lausanne. Le Ô est allé interviewer cette experte de la politique sur les futures élections du canton de Neuchâtel.
– Quel regard portez-vous sur les coalitions de la Gauche unie et de l’Alliance neuchâteloise ?
– Je trouve que ça va vraiment dans le prolongement des développements qu’on a pu observer dans le cadre des élections fédérales de 2023. Dans plusieurs cantons, il y a eu des alliances nouvelles entre PLR et UDC alors que, pendant longtemps, c’était vraiment exclu pour les Libéraux-radicaux d’effectuer ce type d’alliance. À gauche, l’alliance PS, Verts et POP est beaucoup plus naturelle. Le changement est à droite et s’inscrit dans la tendance récente suisse. On remarque dans les données que l’on collecte dans le cadre de l’étude électorale suisse que ça s’inscrit dans une différenciation, une polarisation croissante entre deux blocs. Les blocs gauche / droite deviennent plus distincts. Il y a toujours moins de gens qui s’imagineraient voter un jour pour un parti situé dans l’autre bloc.
– Vous parlez d’une alliance un peu contre nature à droite. Est-ce une manière pour le PLR, qui est en perte de vitesse, de rester en vie dans ces élections ?
– Souvent, quand il y a eu ce genre d’alliance, l’argument mis en avant était de dire : « On n’est pas d’accord sur tout mais nous partageons des valeurs et des positions communes. » Le fait de mettre en avant qu’ils ne sont pas d’accord sur différents éléments importants de leurs programmes fait penser qu’il y a beaucoup de considérations électoralistes là-derrière. Le but est évidemment de gagner des voix et des sièges. Mais on a vu aux élections fédérales de 2023 que ce n’était pas toujours une stratégie gagnante pour les libéraux radicaux.
– Les Verts-libéraux ont-ils une chance en ne faisant partie d’aucun bloc ?
– Cela va plaire à un électorat centriste qui pouvait voter le Centre ou PLR avant. Cela leur permet de se mettre en évidence par rapport à cela. Mais c’est clair que quand il y a deux gros blocs en présence, ce n’est pas forcément évident de tirer son épingle du jeu en étant dans aucune de ces alliances.
– Vos pronostics pour ces élections à venir ?
– Je pense que ça va être très serré parce que même si les villes, qui votent à gauche, sont importantes, c’est de loin pas représentatif de l’ensemble du canton. Donc, même si on voit que c’est une tendance globale des villes d’être plus marquées à gauche, dans les agglomérations et la campagne, on voit plutôt la tendance inverse se produire…