Et le temps ne fait rien à l’affaire… Ce n’est pas ce bon vieux Georges qui prétendra le contraire. Comme vous avez pu le constater, chères et chers lectrices-teuses-teurs, les temps changent, les avis comme l’orthographe également. Il fut un temps encore, on invitait avec faste et volupté ses meilleurs amis pour étrenner sa nouvelle Tesla flambante neuve et flambante tout court. Ce fleuron de la high-tech Muskienne, cet engin magique, suscitant convoitise et admiration, outil d’élévation sociale, a vite fait de reléguer la masse prolétarienne dans les bas-fonds de la malbouffe qui se contentera d’un Big Mac coulant et indigeste et d’une feuille de salade pour faire passer la pilule.
— Tu as changé de voiture ? Tu n’avais pas une Tesla ?
— Chuuuuuut ! Parle plus doucement ! On pourrait nous entendre…Et pas au téléphone… J’ai dû la cacher dans le garage de ma belle-sœur, elle est en sécurité chez elle mais jusqu’à quand… Elle doit changer de planque tous les trois jours… C’est devenu l’enfer… Elle pourrait venir chez toi quelques jours, je te donnerai quelque chose… S’il te plaît, on est des amis non ?
Le propriétaire de cette Tesla, devenue en quelques heures maudite, véritable paria, rase maintenant les murs, honteux, sa petite merveille technologique risquant à tout moment d’être immolée par le feu ou griffée, taguée, raillée et rayée. Sous la vindicte populaire, la conquérante du Nouveau Monde doit faire profil bas et devient une renégate, l’ennemi public n° 1, la tête que l’on doit couper. Finies, les moqueries de l’époque où l’on achetait chinois ! Maintenant, on arbore avec fierté son nouveau faux vase Ming de chez Temu, trônant dans notre salon comme nos t-shirts fabriqués par des enfants souriants. C’est l’armée suisse maintenant qui ne sait plus comment faire avec ses avions de mauvais augure, commandés, et surtout télécommandés, depuis chez nos anciens alliés et qui planent comme des vautours au-dessus de nos têtes si peu remplies et de nos poches vides.