Et vous quelles techniques utilisez-vous pour ne pas y penser ?

Par Kevin Vaucher

Bon allez, j’avoue ! J’ai triché un peu dans le titre. La conférence proposée par Les Vert·e·s de La Chaux-de-Fonds (7 mai, 19 h 45, Notre-Dame de la Paix) ne va pas s’intéresser aux techniques pour éviter de voir le problème climatique. Frédéric Rognon viendra partager les pensées de Jacques Ellul qui avait tout vu venir avant que cela devienne réellement un sujet de société. Il a notamment étudié comment l’évolution de la technique a une influence sur nos vies et notre consommation d’énergie.

Commençons par faire les présentations ! Frédéric Rognon est le plus grand spécialiste de la pensée de Jacques Ellul, lui-même grand penseur français du XXe siècle (1912 – 1994). « Plus proche de chez nous, on peut aussi dire que c’était un ami de Denis de Rougemont. Sa philosophie était incroyablement visionnaire car il parlait déjà d’écologie et de perte de diversité », étaie Claude Paroz, un sympathisant de la cause. Autant dire que s’il reste des réfractaires à ses thèses aujourd’hui, il passait littéralement pour un fou à son époque. « Il a d’ailleurs fallu 5 ans pour qu’il trouve un éditeur pour son livre La Technique ou l’Enjeu du siècle. »

Humain et technique, un rapport d’amour et de haine ?
L’évidence n’avait rien d’évident lorsqu’il a commencé à théoriser ses idées et notamment celle de la société technicienne dans laquelle on vit. « Il s’est penché sur les rapports entretenus par l’être humain et la technique, se demandant par exemple quelle place elle laissait encore à l’humain et quel impact elle avait sur notre quotidien dans tous les domaines (professionnel, politique, alimentaire, sportif, culturel…) », développe Marie-Claire Pétremand. L’élue des Vert·e·s y a trouvé un énorme écho et une forte résonnance avec ses préoccupations. « Ce qui est dingue, c’est qu’il n’avait même pas connu l’essor d’Internet et qu’il avait pourtant si bien expliqué quelle emprise le monde numérique aurait sur nous. »

« On va dans le mur en termes de consommation d’énergie »
à chaque innovation technologique, on pense alors qu’on a atteint le sommet de la technique et qu’on ne pourra pas aller plus loin. Mais on se trompe à chaque fois. Qui avait vu venir une telle démocratisation de l’intelligence artificielle ? Au moins, cette fois, on sait que l’IA offre des possibilités infinies et on tente d’anticiper ses effets à long terme sur l’emploi et sur notre manière de vivre. Malgré tout, cette course à la technologie a de quoi donner des vertiges quand on y pense ! Là encore, Jacques Ellul avait parfaitement identifié ce sentiment : « Pour lui, la technique s’auto-alimente telle une vague qui ravage tout sur son passage et le résultat n’est pas très réjouissant lorsque l’eau se retire. On va dans le mur en termes de consommation d’énergie et d’écologie », ajoute Claude Paroz.

Après un tsunami technologique, tout est à reconstruire
Pour continuer avec ce parallèle, on a pu constater que tout était à reconstruire après un tsunami. Un terrain propice aux excès et à l’intensification des dérèglements. Peut-on penser qu’un jour les politiciens et politiciennes saisiront une opportunité pour reconstruire une société mais « en mieux » ? « Ellul avait une vision très sombre de l’avenir mais il gardait espoir grâce à sa foi chrétienne », reprend Marie-Claire Pétremand. N’avait-il pas foi en la politique ? « Non, il était très critique vis-à-vis des partis politiques. Il faut dire que la lutte écologique a réellement commencé il y a une cinquantaine d’années seulement. » La récente élection de Céline Vara au Conseil d’État neuchâtelois montre que la conscience environnementale fait aussi son chemin. La question est de savoir si elle se déplacera plus vite que la vague de la technique un jour…

Jacques Ellul. (photo dr)
Frédéric Rognon. (photo dr)
Frédéric Rognon. (photo dr)

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