Otages (in)volontaires de la vulgarité guerrière

Yves Strub
Médecin retraité et conseiller général

En analysant le regard des enfants, transis d’admiration face aux hommes partant au combat, le frisson nous saisit quand c’est dans un œil adulte qu’un même éblouissement jaillit. Miroir de la vie, les médias s’abandonnent à la fascination pour la guerre, qui s’invite avec photogénie.

 

De ruines esthétisées à la virile beauté armée, voire des morts en plans choisis aux captifs exposés enchaînés, l’exhibition exerce une séduction perverse.

Tant le soldat que l’observateur, enivrés de la mission, sont galvanisés par le combat, défiant la mort pour la gloire, sans en percevoir l’odeur pestilentielle, ni l’image se muer en mythe. Le récit développe l’émoi d’une communion et demande de choisir entre le bien et le mal, le soi et autrui, la victime et le tortionnaire. Cette dualité fait mouche, charmant de surcroît les contemplatifs en mal d’hommes d’action déifiés.

 

Suprême tressaillement, l’attrait de la violence s’insinue sous la chair. L’existence arbore quelque panache sur un fond bien ordinaire. La lutte pour la liberté se déclare un devoir ; la justification idéologique arme la guerre ; les représailles appellent la rétorsion. La griserie du pouvoir oblige à l’intransigeance en condamnant le compromis à la veulerie et le droit au cache-sexe.

 

Entre science et fanatisme, entre information et propagande, entre analyse et intox, entre Histoire et oubli, le quidam s’y perd. Et il n’a d’autres remparts pour préserver la justice et la dignité que d’imposer à son point de vue une réflexion (auto)critique. Aussi exigeant que nécessaire.

(Photo : Le Ô)
(Photo : Le Ô)

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