Hanoï – Paris – La Chaux-de-Fonds : La fabuleuse histoire d’un bout de tissu

Giovanni Sammali

Ou quand Nicolas Moser, architecte au Vietnam, envoie son pote de Paris prendre une photo dans sa ville de cœur!

 

Parc des Musées, un midi de semaine. Ciel bleu, neige et soleil. Un photographe et son trépied face à une couverture. Un visage jamais vu à La Tchaux. « Bonjour! Originale, votre prise de vue. Vous faites quoi? » « Et vous? » répond, amusé, l’inconnu. Début d’une de ces rencontres typiques que l’on peut faire à La Chaux-de-Fonds. Elle tient même d’une fabuleuse histoire à la Amélie Poulain. Petit chien a eu du flair: le photographe Joseph Gobin est venu exprès de Paris avec ce bout de tissu, mandaté par un architecte-designer de Hanoï. « On réalise des images très urbaines autour de cette étoffe. Nicolas en souhaitait une prise ici, dans sa ville. » Discussion. Rires. Comment résister à contacter ce Chaux-de-Fonnier de l’autre bout du monde? Et quand apparait le visage sur l’écran, la ressemblance laisse peu de doute: « Oui, je suis le fils de Claude-André, le docteur. » Interview. A 10’000 km et 6 heures de décalage horaire.

 

« Je suis venu au Vietnam en 2007. Le bureau genevois qui m’employait m’a envoyé ouvrir son agence. Je pensais rester six mois… ». Nicolas Moser sourit. Derrière lui, une photo de La Tchaux : 16 ans ont passé et c’est de Hanoï qu’il répond, depuis Multiply Office, son bureau lancé il y a deux ans.

 

 

La Villa Mayor à Neuchâtel

« J’ai quitté une agence de 40 personnes pour être plus flexible. On fait plein de choses. Ici au Vietnam, à Singapour et Hong-Kong. Masterplans, architecture d’intérieur, meubles et beaucoup de concours en Suisse. » Il a décroché la rénovation, « avec création de piscine », de la Villa Mayor à Neuchâtel, mais son joli projet pour le pont de l’Hôtel-de-Ville à La Chaux-de-Fonds n’a pas été retenu.

 

Sans oublier les tissus! « Oui, comme vous l’avez vu! Cette couverture est notre griffe. . Je suis passionné par la ville, par l’urbanité, et ce tissus de 150 sur 150 cm est notre couteau suisse pour en profiter. Châle, nappe de pique-nique, linge de piscine (une autre de nos philosophies)… On en a fait aussi un sac pour une Nuit de la photo de La Chaux-de-Fonds (que préside son papa). On la décline en 4 motifs, choisis au marché de Hanoï, à de petits artisans. Puis des artistes exposent nos couvertures en ville et les photographient. J’avais donné carte blanche à Joseph pour « shooter » à Hong Kong un tissu de 10 m de long (photo ci-contre). »

 

Nicolas Moser pense aussi son bureau comme un couteau suisse. « Généralistes, nous lançons la phase conceptuelle, puis on monte un pool interdisciplinaire et on accompagne les hyper-spécialistes. » Le risque de se disperser? « Plus on rencontre de gens, plus des opportunités et des idées germent. »

 

Avec des partenaires à Genève et à Lausanne, son bureau hongkongais est en réalité très helvétique.
« Mon épouse occupe de plus un poste dirigeant ici, dans l’agence de mes anciens employeurs g8a  architects. Opérer dans deux univers est un enrichissement, et permet de vivre et créer des dynamiques très différentes ». De Hanoï à La Chaux-de-Fond, par exemple!

 

www.multiplyoffice.com/portfolio/memory-of-shape/

« La Chaux-de-Fonds m’a donné le goût de l’urbain »

 

Quand rentrez-vous au pays ?
Deux fois par an, hors pandémie… Je reste très attaché à ma ville. La majorité de mes amis sont encore là! Même si ça en fait marrer beaucoup, je compare tout le temps Hong Kong et La Tchaux. Je vis notre ville comme une grande capitale, pour sa densité, son dynamisme. Ma femme parisienne la trouve petite et calme, mais moi j’y trouve toujours de l’épaisseur et de la richesse. Je ne m’y sens pas à la campagne, pourtant si proche. Mon amour de la ville, ce goût de l’urbain qui oriente tout mon travail, viennent d’elle.

 

Le Ô vu d’Hanoï?
J’aime beaucoup: un média fait à La Chaux-de-Fonds, pour et par des Chaux-de-Fonniers-ères est un vrai plus. Il va renforcer la communauté, les échanges, l’esprit d’appartenance. Je souffre beaucoup, à distance, de lire que notre ville perdrait de son âme et de son potentiel, que des gens s’en vont. En réalité, on passe à côté de choses très fortes. Le Ô peut corriger le tir!

 

L’Ukraine, vue du Vietnam?
Question ardue. Mon regard, nourri par les médias français et suisses, doit être très proche du vôtre. Mais de ce côté du monde, je peux mieux ressentir la puissance des gouvernements totalitaires et leur potentiel de dévastation. C’est très effrayant. Dans une autre mesure, ça rappelle Hong Kong il y a deux ans, où on a déjà mesuré la puissance et la détermination de ces nations géantes. Le ressenti des Vietnamiens? J’ai l’impression que la guerre est une page tournée pour eux. Peut-être parce qu’ils ont gagné la leur. Je ne vois pas de travail de mémoire auprès des enfants.

De Paris à Hong Kong et à La Chaux-de-Fonds, via Hanoï. Joseph Gobin « shoote » autour du monde les couvertures de l’architecte-designer chaux-de-fonnier
Nicolas Moser (ci-dessus) Photo Multiply Office et gs/Le Ô).
De Paris à Hong Kong et à La Chaux-de-Fonds, via Hanoï. Joseph Gobin « shoote » autour du monde les couvertures de l’architecte-designer chaux-de-fonnier Nicolas Moser (ci-dessus) Photo Multiply Office et gs/Le Ô).

« La Chaux-de-Fonds m’a donné le goût de l’urbain »

 

Quand rentrez-vous au pays ?
Deux fois par an, hors pandémie… Je reste très attaché à ma ville. La majorité de mes amis sont encore là! Même si ça en fait marrer beaucoup, je compare tout le temps Hong Kong et La Tchaux. Je vis notre ville comme une grande capitale, pour sa densité, son dynamisme. Ma femme parisienne la trouve petite et calme, mais moi j’y trouve toujours de l’épaisseur et de la richesse. Je ne m’y sens pas à la campagne, pourtant si proche. Mon amour de la ville, ce goût de l’urbain qui oriente tout mon travail, viennent d’elle.

 

Le Ô vu d’Hanoï?
J’aime beaucoup: un média fait à La Chaux-de-Fonds, pour et par des Chaux-de-Fonniers-ères est un vrai plus. Il va renforcer la communauté, les échanges, l’esprit d’appartenance. Je souffre beaucoup, à distance, de lire que notre ville perdrait de son âme et de son potentiel, que des gens s’en vont. En réalité, on passe à côté de choses très fortes. Le Ô peut corriger le tir!

 

L’Ukraine, vue du Vietnam?
Question ardue. Mon regard, nourri par les médias français et suisses, doit être très proche du vôtre. Mais de ce côté du monde, je peux mieux ressentir la puissance des gouvernements totalitaires et leur potentiel de dévastation. C’est très effrayant. Dans une autre mesure, ça rappelle Hong Kong il y a deux ans, où on a déjà mesuré la puissance et la détermination de ces nations géantes. Le ressenti des Vietnamiens? J’ai l’impression que la guerre est une page tournée pour eux. Peut-être parce qu’ils ont gagné la leur. Je ne vois pas de travail de mémoire auprès des enfants.

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