Quel étrange choix que de jouer un seul en scène

Emeric Cheseaux
Comédien

J’aurais dû être curé. Mais j’étais moins désireux de prêcher que de me marier… avec un homme, qui plus est. Pas sûr que cela plaise aux brebis du saint Berger.

J’aurais voulu être agriculteur. Mais je n’avais ni la force ni le courage de retourner de mes mains frêles quelques panneaux pour hurler, debout sur mon tracteur, mon ras-le-bol des industries sourdes qui d’un geste me labourent à coups de « papratz » et récoltent le blé que j’ai semé.

J’aurais pu être politicien. Mais les beaux parleurs honnêtement, je les préfère muets dans mon lit plutôt que bavards en public à s’égosiller sur des discours qui servent trop souvent à diviser pour mieux régner.

J’aurais tant aimé être père au foyer. Être juste, faire semblant d’avoir raison, trouver des mots qui consolent et qui guident. C’est bien trop de responsabilités.

Peut-être parce que je suis tout et rien de ceux-là à la fois. Aujourd’hui, je m’essaie à devenir comédien surtout parce que je crois que nous avons encore besoin d’histoires pour nous tenir ensemble. Comme le disent si justement ces mots d’Alice Zeniter : « Les infirmières ne savent pas ce qu’est la vie des agriculteurs, les gendarmes ne connaissent pas les conditions de travail des professeurs, les cheminots ignorent le minutage des existences des intermittents du spectacle et absolument personne ne sait comment une écrivaine cotise pour sa retraite. Sans récit et sans image pour relier les sous-groupes, le monde social est fragmenté par l’ignorance et le sentiment d’étrangeté. »

Alors parfois, je me tiens debout devant d’autres pour prendre la parole.

 

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