Même pour un stagiaire du journal Le Ô, la faute n’a pas été pardonnée : éjecté de la conférence de presse pour la nouvelle infirmerie pour avoir oublié dans sa poche son téléphone portable !
14 h 55, j’appuie sur la touche de l’interphone, « je viens pour l’inauguration de la nouvelle infirmerie ». La lourde porte d’entrée s’ouvre. Ça y est, je suis en prison ! Un garde m’accompagne jusqu’au portique de détection. Je passe les contrôles de sécurité sans soucis. Puis, je débarque dans une salle exiguë où journalistes et cameramans attendent sagement la visite guidée du directeur de l’établissement de détention de la Promenade, Nicolas Turtschi.
On nous demande de déposer nos téléphones portables dans un bac. Mais il s’agit de mon seul outil de travail. Impossible de le laisser dans le bac en plastique ! Je le glisse donc discrètement dans la poche de mon pantalon large.
Début de la visite
15 h, la visite démarre, nous arpentons lentement mais sûrement les couloirs et les escaliers étroits. Notre marche étant interrompue, de temps à autre, par des portes s’ouvrant grâce à l’empreinte biométrique.
Enfin, nous arrivons dans les nouveaux locaux administratifs garnis de bureaux et d’une peinture orange pâle en guise d’unique décoration. Nous poursuivons la visite dans l’infirmerie, attraction principale de l’après-midi.
Pris en flagrant délit
J’observe l’infirmerie pourvue de quatre salles dotées chacune d’une œuvre d’art unique signée Charlotte Favre : des espèces de formes rondes en mousse collées sur les murs. J’entre dans une des salles, referme soigneusement la porte derrière moi et j’en profite pour sortir mon téléphone afin de prendre une photo.
C’est à ce moment-là qu’un des agents de détention entre dans la salle et me sermonne : « Je crois que la règle était claire, venez avec moi. » Il montre sa trouvaille à Nicolas Turtschi qui renchérit : « Non, non, vous allez pas l’enlever, vous allez sortir. On a dit qu’il fallait poser votre téléphone. »
J’ai beau me confondre en plates excuses, jouant la naïveté d’un oubli malheureux de mon portable dans ma poche. Mais rien n’y fait, je me suis fait prendre la main dans le sac et ma visite s’arrête net. On me raccompagne vers la sortie sous la surveillance accrue d’un des gardiens. Finalement, je récupère ma carte d’identité et je pose une dernière question à un des matons : « Qu’est ce que vous pensez de cette nouvelle infirmerie ? » Il me répond simplement : « C’était le moment que ça se fasse. »
Peut-être la principale information qu’il s’agissait de recueillir !
Le cas des hallucinations
« Les soignants ont été extraits depuis 2015 et rattachés à une autre structure pour éviter qu’il y ait des conflits d’intérêts entre les rapports hiérarchiques et le secret médical qui doit être garanti même à des détenus. Avant, le service médical appartenait au service pénitentiaire », confie le directeur de la prison. « Cela posait des problèmes quand on avait des agents de détention en contact permanent avec les détenus et qui ne connaissent pas précisément leurs besoins médicaux. Ils se retrouvaient avec des gens qui ont des comportements incohérents. Par exemple, une personne semble-t-il souffrant de troubles psychiques nous a dit qu’elle avait l’impression que des médicaments sortaient de la grille de ventilation et lui rentraient dans les yeux. C’est un peu délicat pour la prise en charge parce qu’on aimerait accompagner ces personnes au mieux mais on n’a pas toujours toutes les informations nécessaires pour. » L’histoire ne dit pas s’il s’agissait en l’occurrence d’authentiques hallucinations ou d’une invention du détenu.