Le temps d’un scandale

Par David Lemaire
Conservateur-directeur MBA

Voilà bientôt sept ans que je dirige le musée des beaux-arts. Sept années durant lesquelles, grâce à une équipe fantastique, nous avons organisé près de cinquante expositions.

Il faut une première fois à tout. Au lendemain du vernissage des expositions d’Adrian Schiess et d’Arno Schmidt, je reçus le courrier électronique d’une personne très en colère me reprochant, bon sang, d’exposer cette m… Et avec nos impôts qui soutiennent le musée !

Sur la question fiscale, je puis rassurer cette personne habitant un village du Littoral : le musée des beaux-arts de La Chaux-de-Fonds n’est financé que par la ville. Mais demeure la question : en quoi ces œuvres sont-elles suffisamment scandaleuses pour inciter un citoyen indigné à se saisir de son clavier pour m’agonir de reproches ?

Leur sujet ? La météo. On a vu plus obscène. Alors quoi ? Mon soupçon est que ce visiteur n’a rien reconnu dans les dessins presque abstraits d’Adrian Schiess. Chacun sait le plaisir, visitant un musée, de retrouver une œuvre que l’on connaît. À l’inverse, chacun sait l’inconfort de se dire qu’on n’y voit rien, qu’on n’y comprend rien. Et pourtant, je crois fermement que la mission d’un musée est de faire découvrir ce qu’on ne connaît pas encore. À quoi une exposition servirait-elle si on n’y trouvait que des objets déjà vus ?

En fait, ce courrier de colère m’a mis en joie. Il signalait, d’une part, que nous avions bien fait notre travail et, d’autre part, qu’il existe des gens pour qui le musée est tellement important qu’il leur faut se fâcher s’ils n’aiment pas ce qu’ils y voient. Alors, scandale ? Venez juger par vous-même.

http://www.mbac.ch

 

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