La chasse aux intrus : une guerre de tous les jours pour Ferenc Baumann
Avant de fonder SOS Nuisibles le 1er avril 2008, Ferenc Baumann a exercé plusieurs métiers comme technicien dentiste, gestionnaire de passagers à Cointrin, pilier de la sécurité dans ce même aéroport de Genève, fonctionnant tantôt comme « tigre » – les fameux agents de sécurité que Swissair plaçait incognito dans ses long- courriers – puis gardien de prison à Champ-Dollon avant d’être patron d’un centre de fitness à Meyrin.
Détenteur d’un permis de technicien en désinfestation, il traque les cafards, guêpes, frelons, fourmis, poissons d’argent, araignées, puces, blattes et autres indésirables comme les rongeurs qui s’incrustent dans votre nid douillet. C’est le cœur bien accroché et avec un certain courage qu’il relève les traces, déniche les nids puis procède à l’élimination d’une faune aussi gênante que rebutante, voire dangereuse.
– Carrière hétéroclite s’il en est ; mais comment devient-t-on nettoyeur ?
– Après la vente de ma société, je suis devenu propriétaire d’une petite maison à St-Aubin. Aux prises avec un nid de guêpes, ça a été une véritable révélation de voir travailler le spécialiste pour éliminer ce piquant souci. Je me suis informé, je me suis formé avant de créer SOS Nuisibles en 2008.
– Que faut-il pour réussir dans ce métier ?
– De la patience, du savoir-faire et une maîtrise technique pour éliminer les nuisibles de manière intelligente. Engager CHF 8’000.- pour obtenir un brevet fédéral est une chose, savoir être disponible afin d’échanger avec mes clients participe au succès. En bossant avec les entreprises, les gérances, les collectivités publiques et les privés, je me suis fait un nom en personnalisant chacune de mes interventions et en les limitant au canton de Neuchâtel.
– Aimez-vous votre métier ?
– Absolument car mes interventions participent à la salubrité d’endroits parfois infestés si profondément que les habitants doivent être relogés plusieurs semaines, le temps que leur appartement soit « décontaminé » du fléau. Parfois ma journée s’éclaire, comme le jour où de jeunes élèves m’avaient traité d’assassin avant que je puisse les convaincre de l’utilité de ma mission par le seul exemple de la neutralisation d’un nid de guêpes. Je suis riche du plaisir et de mes expériences.
– Quels sont vos domaines de prédilection ?
– Je n’en ai pas. Mon objectif est d’aider des locataires ou des propriétaires dépassés par les événements en apportant la solution adaptée.
– Le manque de salubrité est-il la cause majeure de la prolifération des envahisseurs ?
– Evidemment ! Sans stigmatiser la population des cas sociaux, celle-ci n’est souvent pas consciente de son environnement d’où une fréquente absence d’hygiène. Dans ces conditions, lorsque l’appartement n’est plus qu’une poubelle géante, la prolifération d’indésirables est incontrôlable ; il faut évacuer les immondices avant de faire mon job.
– Eprouvez-vous parfois de la peur ou du dégoût ?
– La morsure du rat est douloureuse. Lorsque je rentre dans une canalisation à la recherche de rats, j’ai une appréhension surtout lorsque des jeunes accompagnent les sujets adultes. Une fois, j’ai réussi à esquiver l’attaque d’un rat mais il était moins une d’où une grande méfiance pour ces rongeurs porteurs de la leptospirose. Je n’aime pas les tuer mais dans le cas des rats, 5 fois plus nombreux que la population, je préfère parler de régulation. Face aux nids de guêpes abritant parfois plusieurs milliers de sujets, je me protège mieux depuis que j’ai été piqué 24 fois simultanément au dos. Dans les greniers ainsi que sur les bateaux, certaines araignées sont répugnantes comme les blattes qui passent entre mes pieds.
– La principale difficulté du métier ?
– Les réactions des gens qui s’offusquent de mon travail d’élimination. Tuer des punaises de lit, lorsqu’on sait que la femelle pond 5 à 10 œufs par jour est vertueux mais on m’en fait reproche.
– Votre plus belle prise ?
– Celle d’un nid de guêpes gigantesque d’un mètre carré. Au fil des années, la reine qui peut vivre jusqu’à 8 ans avait survécu et le nid s’était développé. Même si l’organisation du nid est extrêmement rigide, toutes les guêpes ont l’instinct de protéger leur maison et sont capables de piquer 7 à 8 fois avant de régénérer leur venin. Bref, à l’aide d’une lance et de poudre, totalement protégé, je suis intervenu longuement jusqu’à décrocher le nid avant de l’éliminer dans les déchets bio.
– De nouvelles races d’intrus avec le réchauffement et les voyages ?
– Le frelon asiatique qui vole 30 à 40 km par jour est hyper résistant et agressif et sa piqûre est dangereuse. Avec le réchauffement climatique et l’absence de contraste entre les saisons, les fourmis et les blattes germaniques se reproduisent toute l’année. Au retour de voyage, la punaise de lit est le principal fléau.
« Je cherche repreneur »
– De quoi êtes-vous particulièrement fier ?
– De ma ténacité à être resté sportif depuis mes 17 ans. Au bureau, dans mon garage, je soulève des poids 4x par semaine depuis 49 ans. Pour moi, la condition physique va de pair avec l’équilibre mental, raison pour laquelle j’ai décidé de fêter dignement l’événement le 1er septembre 2023.
– Votre regard sur votre canton d’adoption?
– J’ai grandi dans le canton de Genève que j’ai quitté sans remords. J’ai grandi et vécu à Genève, canton que j’ai quitté sans remords. J’ai d’abord habité Saint-Aubin avant de m’installer aux Brenets où je profite pleinement du lac et des montagnes. Dommage que les Montagnes se vident de leurs habitants et subissent des modifications urbaines comme celle de trouver des trottoirs disproportionnés, un Pod défiguré ou le nouvel impôt des cartes de parcage. On veut nous compliquer la vie et limiter nos pouvoirs. Moi, je regrette la fusion des Brenets avec Le Locle et pourtant j’avais voté oui ; tout a augmenté et nous sommes davantage taxés qu’avant. Malgré ces soucis, nous ne repartirions ni à Genève, ni à Lausanne. J’aime mon canton d’adoption.
– Votre plat préféré ?
– J’aime la raclette, la fondue et les steaks vigneron sans oublier une bonne portion de fruits et légumes.
– Avec quelle personnalité partageriez-vous le repas?
– Poutine afin de savoir ce qu’il a derrière la tête (rires).
– Votre endroit où passer de belles vacances ?
– Les Etats-Unis en général, New-York, la Floride et la Californie en particulier à cause du climat, des gens et de leur politesse qui n’est pas que de façade.
– Quel est le métier que vous rêviez d’exercer ?
– Celui d’aujourd’hui qui a été une révélation.
– A part soulever des poids, quel sont vos hobbies ?
– J’aime lire et me documenter sur la nutrition et j’aime m’intéresser aussi aux cultures d’antan et aux habitants de peuplades disparues.
– La suite de SOS Nuisibles Sàrl ?
– Pour me succéder, j’espère trouver un repreneur aussi motivé et convaincant que je l’ai été il y a 15 ans pour ce métier hors du commun.
Une spécialité, l’élimination de champignons
La prolifération de champignons dans les lieux fermés provient d’une humidité trop importante. D’abord apparaît une petite trace. Dans le cas de la mérule pleureuse nettoyer ne suffit pas ; il faut brûler les racines et traiter chimiquement. Plus les moisissures sont importantes, plus le traitement va s’avérer difficile aussi bien pour un privé que pour un spécialiste comme Ferenc Baumann. Conseil : ne pas attendre avant de désinfecter car les champignons présentent de grands risques pour la santé.
Le truc du pro
Pour réussir une élimination sans bavure, Ferenc Baumann recommande le pistolet à vapeur. Devenu populaire pendant la crise du Covid, cet accessoire peu coûteux projette de la vapeur à haute pression (3 bars à 100 degrés). Il permet à chacune et chacun d’éliminer les taches, de désinfecter et de « tuer tout ce qui bouge ». Toxicité zéro pour une efficacité à 100%!
Fédération des désinfestateurs
Depuis 1973, les professionnels sont organisés autour de la Fédération Suisse des désinfestateurs. Elle regroupe plus de 50 entreprises suisses actives dans la lutte contre les nuisibles.
Outre les formations de base et continue, l’association s’occupe de protection de l’environnement et de la santé, d’innovations techniques et de durabilité.
La Fédération est responsable de la formation et reconnue par l’OFSP qui lui a confié l’organisation et l’exécution du cours de formation ainsi que de l’examen d’obtention du permis professionnel. Sur mandat du même office fédéral, l’association tient à jour la liste des personnes en possession d’un permis professionnel pour l’emploi des pesticides de fumigants.