Prises de position en marge de l’initiative populaire sur la répartition du montant versé par la berne fédérale
La Confédération verse plus de 20 millions par an depuis 15 ans. L’affaire qui est technique et complexe mérite quelques explications. Après sa première prise de position de 2020, le Conseil d’Etat qui se fondait sur une étude montrant que les surcharges liées à la géographie et à la topographie étaient toutes compensées, les choses évoluent… dans le bon sens ! Depuis fin mars, le gouvernement propose de reverser 9 millions aux communes bénéficiaires alors que l’Association des Communes Neuchâteloises (ACN) réclame 10,5 millions. Entre l’initiative populaire qui réclame que 90% des 20 millions soient reversés aux communes en dessus de 800 mètres, l’ACN qui milite pour le 50% et la position du Conseil d’Etat, un écart de 1’5 million persiste. Alors qu’une commission ad hoc rédigera son rapport en vue des débats au Grand Conseil, les fronts affûtent leurs arguments sous le spectre d’une cohésion cantonale perdue si l’initiative devait être tranchée devant les urnes. Enjeu : le Grand Conseil trouvera-t-il la bonne formule pour que le comité d’initiative retire son initiative populaire ?
Une étude contradictoire. Pour donner du crédit aux chiffres avancés par les communes, une seconde étude conclut que dans la redistribution actuelle, un déficit persiste en défaveur des communes d’altitude. Dans cette étude de 50 pages, si les chiffres sources sont les mêmes, les bases statistiques sont analysées de façon plus détaillée, notamment en différenciant chacune des trois années de référence et en distinguant l’effet sur l’altitude par palier de 10 mètres. Les experts de conclure que la ville de La Chaux-de-Fonds devrait recevoir dix fois plus d’argent que les CHF 736’000- versés en 2021, soit environ CHF 7’5 millions.
Entre initiative et proposition du Conseil d’Etat, le Grand Conseil jouera-t-il l’arbitre ? Les auteurs de l’initiative qui rappellent que le Canton encaisse chaque année plus de 20 millions liés à la géo-topographie, demandent que la quasi-totalité de la somme soit reversée aux localités situées au-dessus de 800 mètres. Depuis le 29 mars, le Conseil d’Etat oppose un contre-projet à neuf millions, jugé insuffisant aux yeux du comité d’initiative convaincu que la subvention fédérale doit revenir aux communes impactées car depuis 2008, le Canton confisque la majorité du montant sous prétexte de subventions déjà octroyées dans les domaines de l’aide sociale et des transports à ces mêmes communes défavorisées. Pour les villes bénéficiaires, La Chaux-de-Fonds en tête, l’enjeu est de taille puisque la Ville – qui reçoit depuis 2020 de manière transitoire CHF 736’000.- pourrait recevoir jusqu’à 12 millions par an si le peuple dépose un oui dans les urnes et environ 5 millions pour le 50/50 proposé par l’ACN ; ou un peu plus de 4 millions avec le contre-projet du Conseil d’Etat.
Grand argentier de la ville, Jean-Daniel Jeanneret préfère le compromis soutenu par l’ACN plutôt que de risquer le quitte ou double dans les urnes. Pour le conseiller communal en charge des finances, il est dommage que la solution allant dans le sens des auteurs de l’initiative, élaborée par les communes n’ait pas été avalisée par le Conseil d’Etat. Partir en commission, débattre au Grand Conseil, un bien pour la démocratie mais avec le risque, dans le cas où la proposition du Conseil d’Etat devait être retenue ou une solution trop proche, d’une issue devant le peuple avec le spectre de réenflammer le débat haut-bas !
Questionné sur le contre-projet du Conseil d’Etat, Julien Gressot membre du comité d’initiative, se dit soulagé que le Conseil d’Etat voit enfin jour après avoir nié les disparités entre communes de plus de 800 mètres et les autres. Pour le co-président, l’argent confédéral doit être redistribué selon les critères fixés par la Confédération pour aider les communes établies au-dessus de 800 mètres. Ainsi, Julien Gressot déplore que le Conseil d’État cherche à diviser les communes en mélangeant les dossiers, notamment celui de la redistribution de la taxe des véhicules et de l’impôt sur les personnes morales. « De notre côté, nous attendons les recommandations de la Commission Péréquation & Régions qui piloteront les débats au Grand Conseil avant d’émettre un avis définitif sur le maintien ou le retrait de notre initiative, sachant que nous sommes ouverts aux compromis pour autant que la proposition soit acceptable ».
Frédéric Mairy, président de l’ACN, souligne que l’association soutient unanimement par son comité et la conférence des directeurs communaux en charge des finances, organes représentant une large majorité de communes, le partage à 50% des millions de la Berne fédérale entre l’Etat et les communes ; soit un fifty-fifty approximatif à 10,5 millions. Par rapport au contre-projet du Conseil d’Etat, l’ACN veillera qu’aucune commune ne sorte perdante avec le nouveau système qui prévoit de supprimer la part communale à la taxe automobile. Frédéric Mairy se veut confiant : « L’affaire devrait se conclure en commission puis devant le Grand-Conseil car ni notre association, ni le Conseil d’Etat ne voulons passer par les urnes ». Frédéric Mairy de relativiser l’impact du million et demi de différence entre la version du CE et celle de l’ACN sur le budget de l’Etat, en regard des enjeux de cohésion cantonale. Sur la question de report de charges canton / communes, il affirme ne pas sentir le poids de mesures de rétorsions venant de l’Exécutif.
« A ce stade, nous estimons que l’offre du Conseil d’Etat va dans la bonne direction, mais que le montant versé aux communes doit être augmenté, notamment par cohérence avec la suppression de la part communale à la taxe auto ». Le président de placer son espoir dans les débats du Grand Conseil dont l’issue incitera le comité à maintenir ou pas son initiative.
Le système péréquatif, comment ça marche ?
Pour l’expliquer sans le polluer, il faut distinguer la péréquation des ressources et la compensation des charges structurelles. Vouloir corréler les chiffres des subsides de l’assurance maladie, les coûts de la santé, les prestations des transports publics et les recettes fiscales est dangereux pour la cohérence du système. Argumenter de manière globale aurait pour conséquence d’encore appauvrir la population de régions déjà prétéritées par des conditions socio-climatiques défavorables.
Pour affirmer qu’un système péréquatif est cohérent, il faut séparer les disparités des ressources avec les surcharges structurelles et faire en sorte que l’argent versé par Berne au titre de subvention pour une géographie – topographie défavorables profite directement aux communes lésées par leur altitude supérieure à 800 mètres.
L’initiative : Celle-ci demande au Canton de redistribuer 90% de l’argent confédéral selon les mêmes critères qui ont servi de base à la Confédération pour verser entre 20 et 23 millions par an.