Florence Nater : « Un accueil à soigner »

Propos recueillis par
Giovanni Sammali

Conseillère d’Etat depuis mai 2021, Florence Nater s’était préparée aux responsabilités et aux crises. Mais pas une guerre et aux émotions qu’elle engendre…

 

Aviez-vous imaginé ce scénario ?

Je m’étais préparée à rencontre, des responsabilités et des contextes pas forcément maîtrisés. Et puis, la crise Covid était quand même en cours. Mais pas une guerre si proche avec de tels impacts. Mais je tiens à relativiser l’engagement, la pression et le stress que cette situation appelle de ma part : ils ne sont rien en regard de ce que vivent ceux qui sont au front !

 

Un lit. A manger. C’est bien. Et la chaleur humaine…

Clairement. C’est un des gros enjeux de l’accueil à organiser. Ces gens vont arriver avec un parcours sur la route de l’exil, et les chocs d’une situation de guerre. Leur santé psychique est fragilisée. Il faut le dire à celles et ceux qui s’annoncent pour accueillir des personnes : il faudra aussi pouvoir accorder du temps, de l’écoute. « Voici votre chambre et la clé des WC. Appelez s’il y a un souci », ça ne suffit pas. Les accueillants devront aussi avoir une disponibilité. C’est une préoccupation de tout le Conseil d’Etat, et il est clair que les autres départements que le miens vont être sollicités aussi.

 

Comment gérez-vous vos émotions ?

Encore une fois, pour moi ce qui est dur l’est en regard des personnes là-bas. J’ai croisé une jeune femme de 20 ans, dont les parents venaient de prendre la route pour quitter Kiev, et elle n’avait plus de nouvelles : ça nous touche, ça nous renvoie à notre humanité. Je pense à ma fille du même âge… Cela rappelle aussi notre vulnérabilité. Ce qui importe, même dans la fonction que j’exerce, c’est de pouvoir verbaliser les émotions que l’on ressent. Même d’avoir envie de pleurer, il n’y a aucune honte !

 

Votre peur ? Votre espoir ?

Mon grand espoir : que cette guerre se termine le plus vite possible, avec le moins de conséquences. Mais les impacts sont déjà terribles et la reconstruction sera lourde. Mes peurs ? Je peine à en parler, en regard de celles, bien plus légitimes, des personnes touchées… Si la guerre perdure, je redoute qu’on la mette de côté, qu’on la banalise. Je sais que cela participe à notre résilience, comme on a pu le voir avec la pandémie, qui semble d’un coup loin derrière nous. Je souhaite que les engagements des uns et des autres et que notre soutien aux victimes, impactées durablement, soient durables aussi.

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