La marque Schneider & Co : un poids plume tout alu qui tient le choc

Giovanni Sammali
Joyce Joliat

La crise a donné à Alain Schneider le temps de réaliser son rêve : créer ses propres montres. Avec un choix qui fait mouche : le tout alu !

En moins de quatre ans, Alain Schneider a su profiler ses montres et faire décoller son rêve. Le trou de production avant et pendant la crise covid a permis au patron d’une entreprise de robotique basée au Locle de créer sa marque de montre. « Oui, c’est d’avoir du temps qui a été le déclic ». Pour répondre à ses enfants, qui l’encourageaient à produire des montres modernes et colorées, il opte pour le tout alu. Installé depuis un an dans l’aile est de l’ancienne usine électrique, et bien que restant encore dans l’ombre des géants de l’horlogerie, la jeune marque Schneider & Co a su trouver sa place, et un bout de marché. Son concepteur-fondateur s’est au fond inventé une niche sur mesure ! Et porteuse pour l’heure. Preuve en est que ses montres disposeront tout bientôt d’une vitrine spécifique dans le très prisé hall d’entrée du Musée international d’horlogerie. Rencontre avec un patron heureux.

En 2016, le secteur de la sous-traitance horlogère dans lequel il travaille est touché de plein fouet par la crise. Le boulot manque. Disposant de l’outil de production, le technicien constructeur de machines construit un prototype pour s’amuser. Il n’emballe pas ses enfants, lors de séances de brainstorming dominicales. « Ils m’ont lancé : ‟ c’est juste une montre comme une autre. Mets de la couleur, différencie-toi ! ”. C’est là que j’ai pensé à l’aluminium ». L’ADN de sa marque était trouvé. « Et c’est indispensable de pouvoir se fonder sur une telle dimension iconique ».

En faisant tourner ses machines de nuit, Alain Schneider produit une série de 1000 pièces. L’accueil est très positif. Il cède sa boîte et ses robots à une entreprise du Noirmont à qui il confie aussi la production de ses mouvements. Au bout de l’accord prévu, il a relancé avec son fils une entreprise au Locle. « Ma principale source de revenus reste mon métier de base et la robotique. Les montres, c’est surtout pour le plaisir, pas pour s’enrichir : les bénéfices sont tous réinvestis dans la marque ». 

 « Quand un ami horloger qui avait son stand à BaselWorld m’a articulé un chiffre en millions de francs pour arriver à me placer dans des boutiques, j’ai cru l’aventure finie ». Ses enfants vont à nouveau le relancer. « J’avais de jolis produits, mais personne pour les distribuer… Ils m’ont dit de tout miser sur les réseaux sociaux. Et ça a marché. En y passant mes nuits. Mais en un dimanche, j’arrivais à obtenir plusieurs centaines de followers et quelques acheteurs sur instagram ».

Aujourd’hui, Schneider & Co tourne avec son patron, son fils et un employé. 200 à 300 montres, assemblées pour ainsi dire une à une, sont vendues par année.

La suite ? « Avec la monétisation progressive des réseaux sociaux, devenir visible et le rester coûte aussi de plus en plus sur Instagram. Heureusement, Linkedin monte en puissance en parallèle. Et je m’appuie sur ce réseau. Et on cherche des distributeurs (encadré ci-contre) ». 

Autre preuve que Schneider & Co s’est installé dans une bonne niche, des investisseurs ont déjà approché Alain Schneider. « Mais on ne s’est pas entendu. J’ai envie de perpétuer l’idée de belles montres mécaniques, originales par le tout alu, et accessibles ».

Le plus simple pour y parvenir serait bien sûr de garder l’entreprise en main familiale ! « Oui, mais je ne vais surtout pas forcer la main à mes enfants. Je vois toutefois d’un bon œil un de mes fils, faire des études d’ingénieur en horlogerie, et s’intéresser à cette aventure. Et je rêve en effet que l’entreprise reste dans la famille, avec la même philosophie ».

Une perche pour une conclusion toute trouvée à ce récit : Affaire… à suivre !

 

 

« En vendant ma première montre j’ai compris l’émotion dont parle Nick Hayek ! »

Alain Schneider l’avoue : « Ce n’est qu’au moment où j’ai vendu ma première montre que j’ai compris pourquoi Nick Hayek avait dit à une conférence que je suivais : « Une montre, c’est de l’émotion. » 

« Quand c’est votre pièce qu’un inconnu, qui au fond n’en a pas besoin, décide d’acheter, ça fait vraiment quelque chose ! » Au passage, dans un milieu où il a été surpris des jalousies qui ont cours – « même pour un acteur insignifiant comme nous ! » – , le Chaux-de-Fonnier d’adoption loue l’aura du patron de Swatch Group. « C’est à lui qu’on doit de voir re-rayonner l’horlogerie suisse dans le monde ».

Une autre jubilation de l’horloger est survenue dans la propre ville de sa marque. « Une cliente, ravie, m’a raconté qu’elle s’est vue interpeller dans un bus : ‟ C’est une Schneider & Co que vous portez ? ” Elle était presque aussi fière que moi ! ».

 

En vente dans une boutique de… Californie du sud !

Nul n’est prophète en son pays. Reste qu’Alain Schneider ne bouderait pas de voir quelques-unes de ses montres proposées dans des boutiques de la région, et surtout à La Chaux-de-Fonds. L’appel est lancé !

En attendant, si vous voulez voir en vrai une montre de la jeune marque, la prendre en main pour découvrir sa légèreté et vous la mettre au poignet, il y a bien une boutique qui les propose. « Oui, en Caroline du Sud. Aux Etats-Unis ! », sourit Alain Schneider. Explication : une bijoutière suisse établie là-bas, que l’horloger avait félicitée sur Instagram pour ses créations, lui avait commandé 5 montres. Vendues d’un coup. « Du coup, elle m’en a recommandé 5. Et rebelote. C’est notre premier point de vente ! »

 

 

« Notre dernière-née est en alu gravé main »

– L’ADN de la marque ? 

– La couleur et l’aluminium. Cette matière est propice à la créativité et rend nos montres très légères. 

 

– La gamme de prix ?

– Au début, on partait à 499 frs. Pour étoffer la distribution on a vu les coûts en hausse pour vivre sur les réseaux sociaux, on a repositionné nos prix. Notre entrée de gamme se situe à CHF 1000.-, et monte, pour l’heure, jusqu’à CHF 4600.- (modèle alu gravé main ci-contre). 

 

– Légèreté = bon marché… Un handicap ?

– On relève le défi de transformer cette légèreté en atout. Lorsqu’on pose nos montres dans la main des clients, la réaction de surprise est toujours là : le poids déroute. Mais c’est agréable à porter. 

 

– L’aluminium est énergivore. Recevez-vous des critiques ?

– C’est sûr qu’en étant extrait d’un minerai comme la beauxite, l’aluminium pollue. Mais à l’inverse, en Europe, on utilise de l’aluminium provenant à presque 100% du recyclage. Et en comparaison à l’acier ou l’or, les opérations de raffinage ne sont pas nécessaires. 

 

– Des pattes extérieures ?

– Je donne des cartes blanches à des designers ou des artisans de métiers d’art, comme Loic Chatton, Frédéric Jouvenot, ou encore la décoratrice horlogère des Brenets Nathalie Jean-Louis qui a anglé main la DH by Nathalie.

 

– Votre préférée ?

– Notre dernière-née , la Silver Blade. Elle est entièrement gravée main. Et avec l’alu, c’est quelque chose. L’Helvetia très ethno avec son drapeau suisse, est une autre de mes chouchous.

 

schneiderandco.ch

Alain Schneider pose avec les deux montres préférées de sa gamme devant l’usine eléctrique. (gs)
Alain Schneider pose avec les deux montres préférées de sa gamme devant l’usine eléctrique. (gs)

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