Assistez à votre propre enterrement !

Par Augustin Pelot

Pour la Toussaint, Le Ô a décidé de vous présenter un endroit unique : Espace Mortem ! Ici, on ne vient pas pour s’enjailler entre amis, boire un verre ou jouer aux cartes mais pour… parler de la mort. Sa gérante Julie Houriet Salomon organise une multitude d’événements autour de ce sujet tabou qui n’a pourtant rien de mortel. La preuve avec cette célébrante laïque
qui est aussi enseignante.

« Nous n’avons personne à qui parler de la mort », décoche rapidement Julie Houriet Salomon. C’est pour répondre à ce manque de structure qu’elle a inauguré Espace Mortem en juin 2024. « Souvent, à la fin d’une cérémonie funéraire, les personnes venaient s’épancher sur des choses plutôt traumatiques qu’elles avaient vécu par rapport au trépas d’un ami ou d’un membre de la famille. À ce moment-là, je me suis rendu compte que dans l’espace public et même dans l’intimité, nous n’évoquons pas la mort. Nous la mentionnons peut-être pendant la cérémonie, l’apéro qui suit et quand nous rentrons à la maison, c’est fini. Ça n’existe plus. »

« Une personne vivante a la possibilité de se coucher dans son cercueil »
Le but d’Espace Mortem, c’est de créer des événements pour permettre aux gens de discuter de ça avec une porte d’entrée différente », décrit l’enseignante. Une dizaine d’activités ont déjà été organisées à la rue de la Charrière 82. Notamment sur les directives anticipées et l’héritage digital. Le programme de la semaine de la Toussaint sera chargé avec une nouvelle conférence sur les directives anticipées par le docteur Jacques Wacker, et les memento mori les 3 et 5 novembre. « Les memento mori sont basés sur l’expérience coréenne qui est de faire sa propre cérémonie funéraire de son vivant. Nous sommes 2 célébrantes laïques qui célébrons le décès d’une personne vivante avec la possibilité d’être couché dans son cercueil et d’assister à ses propres obsèques. » Je suis sûr que certains frémissent rien qu’en y pensant. Eh oui, c’est Halloween en même temps, c’est de saison !

Une réorientation professionnelle à la suite du décès de sa belle-maman
La Chaux-de-Fonnière de 39 ans a également obtenu une carte blanche avec l’artiste Virginie Rebetez pour La Chaux-de-Fonds Capitale culturelle suisse 2027. Son projet est d’exhumer les récits des gens enterrés au cimetière juif qui est en cours de désaffectation. Un travail d’archives gargantuesque qui sera exposé durant le mois de novembre 2027 aux Anciens Abattoirs. Avant d’œuvrer quotidiennement avec la mort, Julie Houriet Salomon a travaillé dans la restauration et dans le milieu du théâtre. Elle s’est finalement réorientée après un décès : « La vie m’a donné la possibilité de préparer le corps de ma belle-mère et de faire sa cérémonie funéraire. Après, j’ai commencé à le faire pour toutes les personnes âgées décédées de ma famille : mes tantes, mes oncles… Et puis, petit à petit, des amis proches m’ont demandé de le faire. J’ai donc définitivement décidé de faire des cérémonies laïques de manière professionnelle. »

« Avoir la mort en face permet de profiter pleinement de la vie »
Vu que la mort ne lui fait pas peur, que redoute-t-elle de trouver sur sa route ? « Ma peur était de ne pas être une bonne médiatrice dans le cas où il y aurait des conflits entre les gens mais ça a bien fonctionné finalement. » Grâce aux conseils de la célébrante laïque Marianne Guignand, elle s’est formée sur le tas, comme c’est souvent le cas dans ce domaine. Puis, elle a appris le métier d’entrepreneuse de pompes funèbres. Un travail qu’elle continue de pratiquer en parallèle de l’enseignement et de la gestion de Espace Mortem. Dans de tels environnements, le quotidien n’est-il pas pesant de temps en temps ? « Vous rigolez ? Je ne me suis jamais sentie autant vivante qu’aujourd’hui. Avoir la mort en face régulièrement permet de profiter pleinement de la vie ! »

 

La célébrante laïque Julie Houriet Salomon a ouvert Espace Mortem pour parler de la mort sous différents aspects : administratifs, artistiques et expérimentaux. Une structure unique dans le canton. © AP
La célébrante laïque Julie Houriet Salomon a ouvert Espace Mortem pour parler de la mort sous différents aspects : administratifs, artistiques et expérimentaux. Une structure unique dans le canton. © AP

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