Il y a un mois, le résultat des urnes déjouait tous les pronostics. « Accorder aux cantons le droit de prélever l’impôt immobilier sur les résidences secondaires », une question sibylline aux conséquences méconnues. Qu’un des contrecoups soit la suppression de la valeur locative, un impôt fictif unique en Europe, les votants en avaient conscience. Pareil pour les déductions qui vont avec, comme celles des intérêts hypothécaires ou des travaux de rénovation. En revanche, que tous les contribuables – propriétaires et locataires – ne soient plus autorisés à déduire les intérêts liés à leurs crédits privés est un dégât collatéral qui est totalement passé sous le radar.
Pour faire le point, Le Ô s’est entretenu avec José-Carlos Torrecillas, collaborateur scientifique chez Piguet & Galland et Cie SA à La Chaux-de-Fonds et Neuchâtel.
– Concrètement, qui va bénéficier de l’abandon de la valeur locative ?
– Il n’y a pas de généralité mais des cas particuliers. On entend souvent que les propriétaires faiblement endettés ou les retraités seront les grands bénéficiaires. Je préfère répondre que les grands perdants seront celles et ceux qui ont acquis un bien en engageant un minimum de fonds propres car ils pourraient être fortement impactés si les taux venaient à prendre l’ascenseur de manière brutale ou si leurs revenus venaient à baisser.
– Quels conseils donnez-vous aux propriétaires jusqu’à la mise en œuvre en 2028 ?
– Ne tardez pas à entreprendre les travaux de rénovation car les prix risquent de flamber. Mettez en place une stratégie combinant rachat au 2e pilier et épargne dans le 3e pilier et diversifiez vos divers véhicules d’investissement. Aujourd’hui, avec des taux hypothécaires bas, mieux vaut opter pour des placements qui génèrent un rendement supérieur au coût de la dette, plutôt que d’amortir une hypothèque qui coûte peu en intérêts.
– Craignez-vous que les propriétaires n’entretiennent plus leurs bâtiments ?
– Le risque n’est pas que les travaux ne se fassent pas mais qu’ils échappent au circuit des artisans de proximité ou que le travail au noir s’accentue. Je crains que certains chantiers soient confiés à des entreprises étrangères.
– Alors que la droite devrait sauter de joie, comment expliquer le scepticisme de certains de ses ténors ?
– C’est légitime que des voix se fassent entendre pour défendre les entreprises du bâtiment. Dans ce secteur, l’impact ne sera pas nul puisque les travaux de rénovations ne seront plus déductibles.
– Il y a 34  % de propriétaires pour un résultat qui tutoie les 60 %, comment l’expliquez-vous ?
– Parce que de nombreuses personnes ont voté « oui » en pensant taxer les propriétaires de résidences secondaires sans se rendre compte que la réforme impacterait chaque citoyen ayant recours au crédit puisque les intérêts des dettes ne seront plus déductibles.
– Combler ce manque à gagner signifie-t-il une baisse probable du pouvoir d’achat ?
– Oui car taxer les résidences secondaires ne suffira pas. Il faut s’attendre au prélèvement de nouveaux impôts et de taxes en particulier sur les capitaux de prévoyance du 2e et du 3e pilier. L’État n’a pas le choix, ce cadeau fiscal à 1,8 milliard doit être compensé.
– En fin de compte, bonne ou mauvaise nouvelle ?
– Mauvaise pour les entreprises du bâtiment mais bonne de manière générale puisque la suppression de la valeur locative, c’est la fin d’un vrai impôt sur un revenu fictif.
– Avec une baguette magique, quelle serait votre bonne solution ?
– Laisser le choix à chaque contribuable de conserver les avantages du système actuel ou d’opter pour la nouvelle formule qui abolit la valeur locative et les déductions qui vont avec.
 
								 
								
 
								 
								 
								 
								 
								 
								
























